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RetroFoot
19 août 2009

Le match de leurs vies !

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COREE DU NORD

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ITALIE


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1966, l'année où le football retrouvait la terre qui l'avait vu naître lors de la seconde moitié du XIXème siècle puisque cette année-là marquait l'organisation, pour la première fois, d'une Coupe du Monde Outre-Manche. Et si les hôtes anglais allaient profiter de l'occasion pour remporter pour la première (et à l'heure actuelle toujours unique) fois le trophée, l'un des principaux exploits de la compétition allait avoir lieu loin, très loin de Londres et du faste de son Wembley, dans la ville ouvrière de Middlesbrough au bord de la Mer du Nord. Un exploit signé par des Nord-Coréens totalement inconnus et qualifiés de manière rocambolesque pour leur premier mondial. En effet, la majorité des équipes africaines et asiatiques déclarèrent forfait lors des éliminatoires pour protester contre l'attribution d'une seule place pour l'ensemble de ces équipes. La protestation des Africains faisait plus exactement suite au nouveau règlement de la FIFA, stipulant que le vainqueur de la zone africaine devrait ensuite battre le vainqueur de la zone asiatique ou océanienne pour décrocher son billet pour la phase finale. Les Africains estimaient qu'une victoire dans leur zone devrait suffire pour accéder directement à la phase finale. Résultat cette place se joua lors d'un barrage aller/retour entre deux nations, la Corée du Nord et l'Australie, disputé sur terrain neutre à Phnom Penh (Cambodge) pour un résultat sans appel : 3-1 et 6-1 pour les Nord-Coréens lors de ces deux rencontres. Belle performance pour une équipe assemblée à la va-vite quelques mois plus tôt pour tenter de constituer une équipe compétitive pouvant briguer une place au Mondial.


Une première étape réussie avec brio. Pour les Nord-Coréens, atteindre la phase finale n'était pas seulement une chance unique de prouver leur talent, c'était également l'occasion de montrer aux yeux du monde la réussite du régime communiste et de son leader, Kim Il-Sung. Un leader qui déclarait peu avant le départ de son équipe "Les Européens et les Sud-Américains dominent le football international. Comme représentants de l'Afrique et de l'Asie, comme personne de couleur, je vous invite à gagner un ou deux matchs." Et lorsque le "Grand Leader" ordonne, ses compatriotes sont fortement conseillés de ne pas le décevoir. Pourtant lorsque les Asiatiques débarquèrent en Angleterre, ils ne figuraient pas, fort logiquement, parmi les favoris. Loin de là même, puisqu'ils étaient côtés à 1000 contre 1 chez les bookmakers. Sans compter que la participation de la Corée du Nord à cette VIIIème Coupe du Monde n'enchantait guère le pays hôte qui avait rompu toute relation diplomatique avec la dictature communiste depuis la Guerre de Corée (1950-1953). Le Foreign Office (ministère britannique des Affaires Etrangères) s'interrogea même un moment sur la participation de l'équipe avant de finalement accepter la délégation nord-coréenne sur son sol à condition que leur hymne national ne soit pas joué avant les rencontres.


Rien de tout cela bien sûr côté italien. Les Transalpins obtinrent leur billet pour la compétition en terminant première de son groupe de qualification devant l'Ecosse, la Pologne et la Finlande non sans avoir jouée sa qualification lors du dernier match face aux Ecossais à Naples (victoire 3-0). La Squadra Azzura s'appuyait sur des joueurs comme Tarcisio Burgnich, Giacinto Facchetti ou bien encore Sandro Mazzola qui formaient la colonne vertébrale de l'Inter Milan d'Helenio Herrera double vainqueur de la C1 en 1964 et 1965. Les Italiens pouvaient aussi compter sur le stratège du Milan AC, Gianni Rivera. Ils se présentaient ainsi comme un des bons outsiders de ce Mondial. D'ailleurs, le premier match se déroula sans accroc face au Chili pour une victoire 2 buts à 0 grâce à Mazzola et Barison. Mais le second match face à l'URSS se conclut par une courte défaite 1-0, rien de dramatique puisque qui pourrait douter du succès des Italiens face au petit poucet Nord-Coréen. D'ailleurs les premiers matchs n'avaient guère réussi aux Asiatiques balayés par les Soviétiques 3 à 0. Face au Chili, ils arrachèrent dans les dernières minutes le match nul, un but partout, grâce à une réalisation tardive de Pak Seung-Zin. Un petit point certes mais qui permettait mathématiquement aux hommes de Myung Rae-Hyun de rester dans la course à la qualification. D'autre part, les Nord-Coréens avaient lors de leurs deux premières sorties conquis le cœur du public de Middlesbrough qui s’était entiché de cette équipe aux chances si infimes mais au jeu attrayant. "Ils jouaient un bon football - vous savez, ils étaient tous petits et c'était une nouveauté en soi. C'était comme voir jouer une équipe de jockeys. Mais ils jouaient vraiment bien avec le ballon. Ils jouaient un football très offensif, il n'y avait rien de défensif dans leur jeu, et la foule se mit à les supporter au vu du jeu qu'ils pratiquaient."


Feuille du match : Corée du Nord - Italie 1-0

But :
Corée du Nord : Pak Doo-Ik (42ème)

Lieu : Middlesbrough, Ayresome Park

Date : 19 Juillet 1966

Arbitre : M. Pierre Schwinte (France)

Affluence : 20 000 spectateurs (18 727)

Composition des équipes :

Corée du Nord : Li Chan-Myong (Kikwancha Pyongyang) - Ha Yung-Won (August 8 Club), Shin Yung-Kyoo (Moranbong Pyongyang), Lim Zoong-Sun (Moranbong Pyongyang), Oh Yoon-Kyung (August 8 Club) - Pak Seung-Zin (Moranbong Pyongyang, cap.), Im Seung-Hwi (April 25th Sport Club), Han Bong-Jin (April 25th Sport Club) - Pak Doo-Ik (Moranbong Pyongyang), Kim Bong-Hwan (Kikwancha Pyongyang), Yang Sung-Kook (Kikwancha Pyongyang). Sélec. : Myung Rae-Hyun.

Italie : Enrico Albertosi (Fiorentina) - Spartaco Landini (Inter Milan), Francesco Janich (Bologne FC), Giacinto Facchetti (Inter Milan) - Aristide Guarneri (Inter Milan), Romano Fogli (Bologne FC) - Marino Perani (Bologne FC), Giacomo Bulgarelli (Bologne FC, cap.), Sandro Mazzola (Inter Milan), Gianni Rivera (Milan AC), Paolo Barison (AS Roma). Sélec. : Edmondo Fabbri.
 


Le Match :


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Un match nul suffisait aux Italiens pour se qualifier pour les Quarts de Finale de la compétition. Mais les 3 000 supporters de la Squadra présents dans les tribunes d'Ayresome Park allaient avoir une mauvaise surprise lorsque leur capitaine Giacomo Bulgarelli devait quitter la pelouse à la 35ème minute à cause touché aux ligaments d'un genou suite à un choc avec Pak Seung Zin. Les remplacements n'étant pas autorisés à l'époque, les Italiens allaient donc devoir disputer plus d'une heure de jeu à 10 contre 11. La perte de Bulgarelli, pièce maîtresse du dispositif d'Edmondo Fabbri, fut durement ressentie dans l'organisation des Transalpins. Les Nord-Coréens saisirent alors leur chance et prirent l'avantage 7 minutes plus tard lorsque Pak Doo Ik envoya d'une frappe croisée le ballon hors de portée d'Enrico Albertosi. La situation était incroyable : à la mi-temps, les Rivera, Mazzola et autres Facchetti étaient éliminés au profit d'illustres inconnus dont personne ne soupçonnait jusqu'à l'existence quelques semaines auparavant. Les Nord-Coréens avaient déjà impressionné le public par leur rapidité mais ce match allait être l'apogée d'une longue préparation, le summum d'une équipe. En seconde période, Shin Yung-Kyoo, Ha Yung-Won et Oh Yoon-Kyung étaient les égaux de leurs adversaires d'un jour Sandro Mazzola, Marino Perani et Paolo Barison.


Les Transalpins avaient sans doute laissé passer l'occasion de l'emporter durant les 30 premières minutes où ils auraient pu faire la différence avec « facilité ». Mais à 10 contre 11, leur seul espoir reposait sur le talent intrinsèque de leurs joueurs, sur la maestria d'un Rivera par exemple. Mais à l'image de l'équipe entière, ses meilleurs éléments n'étaient pas dans un bon jour. Perani passait en particulier une mauvaise soirée. Un splendide mouvement mené par Barison, Mazzola et Bulgarelli permit au joueur de Bologne de se présenter seul face au portier coréen, Li Chan-Myong mais il écrasa sa frappe et le ballon fut facilement dégagé par les Nord-Coréens. Durant cette deuxième mi-temps, Rivera rata également l'égalisation lorsque, à la suite d'un exploit individuel, il dribbla plusieurs adversaires puis envoya une frappe puissante sortie de belle manière par le gardien asiatique. La chance ne souriait guère aux Italiens. Les Nord-Coréens auraient même pu faire le break lorsque Han Bong Zin chipa le ballon à Facchetti mais son coéquipier Kim Bong Hwan ne put convertir cette occasion au tableau d'affichage. Un raté finalement sans conséquence puisque jusqu'au bout les Transalpins allaient être incapables de marquer ce but qui les aurait qualifiés. La Corée du Nord tenait son exploit, celui qui allait faire rentrer cette équipe dans la légende de la Coupe du Monde. La foule de Middlesbrough ne s'y trompait pas criant " KO-RE-A, KO-RE-A" en fêtant ses nouveaux héros. Quiconque serait passé à côté d'Ayresome Park ce jour là aurait pu penser que Boro venait de remporter la Coupe d'Angleterre (ironie de la situation, cette saison-là, le club venait de chuter pour la première fois de son histoire en 3ème division) ! Personne n'aurait misé un penny sur cette victoire nord-coréenne, ces joueurs venus du nord du 38ème parallèle, d'une république fermée et secrète. Et pourtant, pour pasticher Galilée, ils l'ont fait ! Un exploit qui avec le recul semble rendre prémonitoire les paroles de l'hymne joué à la place du traditionnel hymne national avant les matches de la Corée du Nord, un hymne où figurait ces quelques mots... "Nous sommes capables de battre n’importe qui, même la meilleure équipe"...


"Prolongations" :


Si cet exploit fut retentissant, il ne fut pas sans lendemain puisque la Corée du Nord en terminant deuxième du groupe derrière l'URSS se qualifia pour les quarts de finale de la compétition. C'est ainsi les tombeurs de l'Italie qui se présentèrent quelques jours plus tard sur la pelouse de Goodison Park pour affronter le Portugal, emmené par sa Perle Noire Eusebio. La victoire sur les Azzurri aurait sans doute dû attirer l’attention du Portugal sur le danger que présentent ces Nord-Coréens. Surtout que dès la première minute de jeu, une frappe du droit de Pak Seung Zin vint se loger sous la transversale du portier portugais Jose Pereira. Un début en fanfare confirmé par un nouveau but à la 22ème, lorsque sur une contre-attaque, Li Dong Woon plaça une puissante demi-volée dans des filets portugais à moitié vide puisque le gardien lusitanien venait de repousser un centre tendu de Yang Sung Kook de... la figure ! Les Portugais allaient boire le calice jusqu'à la lie puisque trois minutes plus tard Yang Sung Kook faisait à nouveau trembler les filets du Portugal. Le malheureux José Pereira venait d'encaisser trois buts en à peine 25 minutes de jeu : un début de rêve pour les Asiatiques. Les Portugais semblaient K.O. debout. C'était sans compter sur le talent d'Eusebio. Deux minutes plus tard, la Panthère Noire dribbla le gardien nord-coréen puis catapulta le ballon dans la lucarne. Un but qui allait totalement relancer le Portugal. Alors que la première mi-temps touchait à sa fin, le Lusitanien José Torres filant au but, fut victime d'un très rude tacle par derrière et ce fut fort logiquement que l'arbitre israélien Menachem Ashkenazi désigna le point de penalty. Eusebio se chargea de faire justice à son partenaire en ramenant le Portugal à un but d'écart juste avant le retour des équipes aux vestiaires. La Corée du Nord venait de laisser passer sa chance d'attendre le dernier carré du Mondial. La seconde période fut en effet à sens unique avec deux nouveaux buts pour l'attaquant vedette du Benfica (dont un nouveau penalty). Un succès parachevé en fin de rencontre par un dernier but de José Augusto. 5-3 au final pour le Portugal ! Un match lui aussi entré dans la légende de la Coupe du Monde qui vit les Nord-Coréens, malgré l'élimination, réaliser à nouveau une performance de grande qualité. Une équipe inconnue avant le coup d'envoi de la compétition qui élimine un des grands outsiders de la compétition (l'Italie) avant de faire longtemps trembler le Portugal, de quoi marquer les mémoires ! Le parcours de ces valeureux Coréens restera sans doute à jamais gravé dans les annales…

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